Trait d’union entre la vallée de Joux et la Franche-Comté, le Massif du Risoux (selon
Suter : montem Risum en 1177, Risso en 1186, Riso en 1219, Risoud au XVIIIème
siècle) constitue une structure anticlinale qui domine l'accident de Morez situé au sud-
ouest. Cet anticlinal se poursuit au delà de la frontière suisse jusqu'à l'accident de
Vallorbe-Pontarlier. Son altitude varie entre 1250 et 1300 m et ses limites
topographiques sont marquées par des escarpements importants. L'intense érosion
glaciaire a façonné le relief du replat sommital en d'immenses dépressions et combes
étroites au fond desquelles les masses d'air froid plus denses restent prisonnières. Sur
les sommets, l'eau et le gel ont sculpté les dalles calcaires compactes en lapiaz. Ce massif
forestier présente par son étendue, son altitude et la diversité des milieux naturels une
valeur biologique considérable. On notera l'époque difficile où la frontière n'était
pas fixée ce qui engendrait de nombreux conflits et la pratique de la contrebande du
bois!
La hêtraie-sapinière occupe les secteurs
d’altitude inférieure à 1200 - 1300 mètres, sur
les pentes moyennes et faibles. Le peuplement
est dominé par le hêtre et l'épicéa, le sapin étant
inégalement réparti (absent dans la partie sud).
Quelques anciens prés-bois sont colonisés par
des peuplements presque purs d'épicéas. A
partir de 1200 m d'altitude, sur sol acidifié en
surface par les précipitations abondantes, la
hêtraie-érablaie (ou hêtraie à hautes herbes)
se rencontre sous forme d'îlots ponctuels. Les
arbustes sont présents avec le sorbier des
oiseleurs, les chèvrefeuilles noir et des Alpes ou
le rosier des Alpes. L'exubérance des espèces
herbacées confère au groupement une
physionomie tout à fait originale avec la présence
d'espèces de grande taille comme le prénanthe
pourpre, le persil sauvage, la renoncule à
feuilles d'aconit... Sur les lapiaz de la zone
centrale fortement érodée, l'épicéa assure à lui
seul la couverture arborée. Cette pessière
s'installe sur des sols peu épais, très humifères et
acides en surface, favorables à une petite
orchidée, la listère cordée ainsi qu'à l'airelle et
la myrtille. La Chaux Sèche, la Roche du
Creux sont des pelouses sommitales à flore
subalpine remarquable : nigritelle noire,
campanule en thyrse (protégées en Franche-
Comté)...
Cette variété de milieux s'accompagne d'une
faune caractéristique des forêts d'altitude. Ainsi,
la forêt du Risoux est connue comme un bastion
historique de la chevêchette d'Europe en France, mais aussi de la gélinotte des
bois, du grand tétras (1) (2), du venturon montagnard, et du tarin des aulnes.
La Chaux-Sèche constitue une originalité importante de ce massif. Pour les reptiles, ce
secteur présente une caractéristique biogéographique importante avec la jonction des
domaines de la vipère aspic et de la vipère péliade. Chez les mammifères, le lynx
est très bien représenté dans ce secteur et dans le monde des insectes, quelques
papillons diurnes sont remarquables (piéride de la bryone, insecte d'altitude
relativement rare et lié aux bordures des chemins où l'arabette constitue la plante
hôte. Il convient également de signaler l'apollon et l' azuré des mouillères, tous
deux protégés et inféodés aux pelouses sèches).
Dans la forêt du Risoux, l’épicéa est « columnaire », de forme allongée, adapté à la neige
et au vent. Cette forêt fournit la majeure partie du bois de résonance d’épicéa aux
luthiers. Un arbre sur 1000 présente cette caractéristique avec un prix atteignant les
sommets. Que voit-on sur la table d’harmonie d’un violon – ou d’une guitare, d’un
piano, d’une harpe…?